The innovator dilemma

2018-02-02

Ce fut long, mais j’ai enfin terminé : The Innovator’s Dilemma par Clayton M. Christensen.

Le livre en lui-même est assez rude à lire. C’est une “thèse” avec une approche très scientifique et beaucoup de sources et de graphiques.

Mais le fond est très enrichissant pour mieux comprendre comment l’innovation se produit et surtout pourquoi les gros groupes innovent difficilement.

Ce livre m’a vivement été conseillé par un serial-entrepreneur pour mieux comprendre ce qui rend un projet disruptif et pourquoi les grands groupes ne voient pas forcément arriver la technologie qui va les détrôner.

Je vais essayer de résumer dans cet article les grands points.

Les exemples

Tout le long de l’ouvrage, l’auteur illustre son propos avec des exemples de grands groupes ou de domaines qui ont été transformés.

Les points communs

L’auteur s’intéresse ensuite aux points communs entre ces différentes sociétés et l’innovation qui émerge.

Une technologie moins performante

Le premier point qui apparait, c’est que la technologie qui émerge est souvent moins performante que celle installée. Les disques durs étaient d’une plus petite taille mais aussi d’une plus petite capacité. La qualité des photos numériques était ridicule, les pelleteuses hydrauliques peu performantes.

Un marché différent

Avec une technologie moins performante, on ne peut pas attaquer de front le même marché. Ces produits se sont adressés sur des niches précises. Disques durs dans des pc personnels ou dans l’embarqué, pelleteuse pour creuser des fondations plutôt que des mines, imprimantes personnelles plutôt que professionnelles.

Un marché peu intéressant pour le concurrent établi

Le pourcentage de pc personnel au début de l’informatique personnelle était négligeable pour un grand groupe orienté sur les serveurs. Les marges étaient trop réduites pour utiliser des pelleteuses à câbles sur les fondations d’une maison.

Mais le marché est intéressant pour un nouvel arrivant.

En résumé : Un marché à 1 million d’euros ne représente que 0,1% du chiffre d’affaire d’une société sur un marché à 1 milliard d’euros. Ce n’est pas intéressant pour elle de se positionner dessus.

Par contre, c’est un marché conséquent pour un nouvel arrivant.

Mais une technologie qui évolue exponentiellement

Les disques durs, l’appareil photo numérique ont profité d’un dérivé de la loi de Moore qui postule que la “puissance informatique” double tous les 18 mois. Ainsi, la qualité et les performances se sont améliorées de manière exponentielle. Les disques durs plus petits ont rapidement égalé les disques durs plus classiques. La qualité des photos est devenu égale puis supérieure à l’argentique. Et une fois que le produit a été financé sur le marché de niche, il a pu s’élargir à un marché plus global.
On retrouve d’ailleurs cette notion de “faire son monopole” propre à Peter Thiel dans Zero To One.

Le grand groupe essaye de se rattraper

Le grand groupe voit ses parts de marché diminuer et réalise la concurrence. Il a plusieurs solutions :

Mais malheureusement cela ne suffit pas forcément. On a vu beaucoup de société disparaitre après un rachat, tout comme des succès copiés mais difficilement égalés (coucou Samsung, Apple et Microsoft)

Pourquoi ?

L’écoute des utilisateurs

Steve Ballmer quand il était président de Microsoft a souvent décrié “Personne n’achètera telle technologie”. Parce qu’il était trop à l’écoute des utilisateurs et de leurs besoins. Une citation attribuée à Ford dit “Si j’avais écouté mes utilisateurs ils auraient voulu des chevaux plus rapides” et ils seraient passés à côté de la voiture. Une technologie disruptive est là pour combler des besoins que les utilisateurs n’ont pas encore forcément remarqués.

Le parc d’utilisateurs déjà en place

Il est difficile de changer les habitudes de ses utilisateurs. La résistance au changement est souvent très forte mais paradoxalement, ils finiront par changer d’eux-mêmes. Une société qui propose un produit précis aura du mal à vendre un produit plus innovant mais avec un fonctionnement légèrement différent. Ce n’est pas ce que ses utilisateurs attendent d’elle.

Confondre processus et ressources

Les ressources d’une entreprise sont ses employés, ses technologies.
Les processus sont plus liés à la culture de l’entreprise, au savoir-faire.
Prendre un et négliger l’autre est souvent une cause d’échec lors d’un rachat. Bon nombre d’entreprises ont été rachetées par des grands groupes puis ont eu des difficultés à pérenniser leur succès. Soit parce que les ressources - les meilleurs employés - sont parties soit parce que la culture de l’entreprise a été phagocytée par l’entreprise rachetant.

J’apprécie beaucoup la stratégie de Facebook à ce sujet qui rachète une entreprise, lui donne plus de moyens mais la laisse dans son coin, avec sa culture et sa marque propre (Instagram, Whatsapp). Google au travers d’Alphabet a une approche intéressante en permettant à chaque entité de garder un peu d’indépendance.

En conclusion

Quand on vous demandera “Mais qu’est-ce qui empêche Google de faire pareil ?”, vous pourrez répondre :

Choisissez bien votre marché en fonction de votre produit, ciblez bien la fonctionnalité disruptive et foncez !